Publié le 04/09/2018

Ils ont créé leur entreprise (5) : Marie Piccioli et Loïc Vandenhende : Maraîchers en bio

Ils ont créé leur entreprise (5) : Marie Piccioli et Loïc Vandenhende : Maraîchers en bio

Propos recueillis par Rémy Dréano.

 

Ils ont tous deux 27 ans et une bonne dose de fraîcheur et d'insouciance. Mais, ils ont surtout en commun deux vertus essentielles pour mener à bien un projet aussi exigeant que le leur : patience et sang froid.

De l’audace et du sang froid, il en fallait pour se lancer dans le maraîchage bio avec, derrière eux, une saison de six mois en Corse au sein une exploitation maraîchère.

Loïc est originaire du Pas-de-Calais. Marie, elle, réside en Bourgogne.

Tous deux se considèrent comme des novices en matière de maraîchage, mais c’est sans hésitation qu’ils ont lancé en mars 2016 leur petite entreprise répondant au nom de Grèn Sémé, un jeu de mot sur un vocable créole.

« Nous nous sommes rencontrés lors d’un voyage à l’Île de la Réunion où nous sommes restés un an. De retour en métropole, nous sommes partis en Corse pour faire la cueillette des châtaignes. En prospectant sur le local, nous avons décroché à la suite un job de saisonnier chez un maraîcher » raconte Marie.

De retour en Bourgogne, tous deux sont résolus à s’installer à leur compte en maraîchage bio, un métier qui concilie leurs principales aspirations : être indépendant et exercer un métier au grand air.

L’idée est de cultiver des légumes de saison, des variétés anciennes : courgettes, tomates, pâtissons, concombres en été - carottes, épinards, poireaux, courge en hiver, mais aussi ail, oignon et des herbes aromatiques, dont certaines sont peu cultivées sous nos latitudes, comme la marjolaine de Syrie.

 

Mais, avant cela, il fallait trouver des terres. Or, on le sait, l’accès au foncier est un problème de taille pour des aspirants agriculteurs. Marie a bien sûr sollicité sa maman qui est elle-même viticultrice. Mais viticulteur et maraîcher, ce n’est pas tout à fait la même partition. Le réseau de chacun est néanmoins mis à contribution….

« Nous avons trouvé quelques bouts de parcelles en friche à Chichée (près de Chablis). Cela a pris du temps. Il a fallu se rendre au cadastre et négocier un à un avec les propriétaires. Par chance, tout le monde a bien joué le jeu. De fil en aiguille, nous avons récupéré des bouts de location. Quand on s’est lancé au printemps 2016, on ne savait pas grand chose, on partait dans l’inconnu... On s’est dit seulement, on verra bien où l’on atterrit…» poursuit Marie.

Cinq mois plus tôt, conscient des limites de leur expérience corse, Loïc avait pris la précaution de s’inscrire au CFPPA d’Auxerre La Brosse pour préparer un BP REA à distance.

« Cette formation à distance, c’était l’idéal, car nous avions tout de même 2.000m2 de terre cultivable à défricher et à mettre en culture. Nous avons fait le choix de ne demander aucun prêt. Par chance, nous avons pu récupérer gracieusement une petite serre… » reprend Loïc.

Défricher mais aussi remettre les sols en état de culture, semer des graines, arroser, irriguer, fertiliser et, bien sûr, trouver des solutions efficaces pour protéger les cultures contre les parasites. Une démarche quelque peu empirique qui a valu à nos aventuriers en herbe quelques déconvenues au début, mais pas de quoi entamer leur détermination…

« L’une des erreurs que nous avons commise a été de reproduire le modèle que nous avons vu en Corse. Or, le climat est différent, tout comme la terre. En tout cas, où que l'on soit, l’accès à l’eau est essentiel". Et, pour arroser, irriguer, il faut de l’eau, beaucoup d'eau..

Durant sa formation, Loïc découvre que le BP REA le rend éligible aux aides jeune agriculteur…

« Notre but est bien sûr de gagner notre vie, ce qui n’est pas encore le cas. On en a profité pour demander des aides cette année. Quand on commence dans le maraîchage, on a vite fait de se disperser, la clientèle vous y pousse. Or, aujourd’hui, nous voulons nous recentrer sur la culture légumière et augmenter la production… »

Et pour ce faire, il fallait trouver des terres plus grandes, avec justement un accès facilité à l’eau pour permettre d’irriguer en tant que de besoin. Au terme d’intenses prospections, Loic et Marie ont fini par trouver une superficie ad hoc; 2 hectares dans une ancienne pépinière désaffectée non loin de Ligny-le-Chatel (89), avec un étang à proximité auquel ils pourront bientôt se raccorder. En attendant, c'est l'eau communale qui est utilisée, ce qui représente un coût.  

 

En tout cas, Loïc et Marie avancent prudemment, jour après jour. Une bonne partie de la terre a été défrichée et mise en culture avant la saison. Une chambre froide a été installée et de nouvelles serres ont été édifiées. Mais beaucoup reste à faire…

 

 « On a appris à être prudent. Avec cette nouvelle terre, cela revient à recommencer. Il n’y a pas de sol parfait, il faut faire avec... L’idée est d’agrandir peu à peu la surface cultivable pour produire plus, pour permettre de se rémunérer correctement. Pour l’heure, nous écoulons toute notre production sur les marchés d’Auxerre (le samedi sous la Tour de l’Horloge) et de Chablis (le dimanche) et nous avons de bons retours".. affirme Marie.

De bons retours qui permettent d’envisager plus sereinement l’avenir. Bientôt, ils produiront en quantité suffisante, assez pour livrer les AMAP et les restaurateurs locaux qui savent valoriser leurs produits. Vendre au jardin, ils y pensent ! . Et plus tard, si tout va bien, ils se lanceront dans la transformation des légumes pour valoriser les invendus.

 

Nos deux maraîchers viennent de s’engager dans la démarche ECOCERT.

 

« On est en bio depuis le début mais sans label. L’engagement avec Ecocert n’est pas si contraignant qu’on veut bien le dire. De plus, la région finance sur le label à hauteur de 80%. Nous avons signé avec Ecocert et de ce fait, nous sommes officiellement en conduite bio » explique Loïc.

 

Nos deux jeunes entrepreneurs savent qu’il n’est pas bon d’être tous les jours le nez dans le guidon.

 

Alors, autant pour parfaire leurs connaissances que pour rompre avec l’isolement, Loïc et Marie profitent des petites formations proposées par l’association Bio Bourgogne (gratuites pour les agriculteurs).

 

Une occasion de se retrouver entre confrères et de partager les expériences...

Grèn Sémé

Rue des Pépinières

89144 Ligny-le-Chatel

Thématique article : Maraîchage bio dans l'Yonne