Publié le 20/11/2018

Small business. Recettes et vertus du Made in France

Small business. Recettes et vertus du Made in France

Par Rémy Dreano. Propos reccueillis sur le salon MIF Expo

 

Startuppers du textile, Instapreneurs en bijouterie, pure players de la lunetterie, ils sont de plus en plus nombreux à lancer leur propre marque sous le label Made in France.

Pour le consommateur, ce label représente avant tout l'atelier niché au coeur des territoires, les savoir-faire ancestraux, la préservation de l'emploi dans nos campagnes rurales.

En fait, le Made in France, c'est d'abord un marquage de l'origine apposée sur un produit. Un avantage commercial, notamment pour le développement à l'étranger, mais qui n'est pas sans incidence pour celui qui s'en prévaut. Pour commencer, il y a des règles douanières et il est préférable de s'y tenir. Indiquer une origine trompeuse sur un produit commercialisé est une infraction qui peut coûter cher.

Pour autant, selon la définition donnée, c'est le lieu de la dernière transformation substantielle qui détermine l'origine, ou encore la notion de 45% de la valeur ajoutée réalisée sur notre sol. Pour certains, cette définition ne va pas assez loin, et c'est pourquoi, on a vu fleurir de nouveaux labels (Origine France Garantie, France Terre Textile, Produit en Bretagne, Entreprise du patrimoine vivant...), l'un n'empêchant pas l'autre, il est vrai.

Il est vrai aussi qu'avec un bon concept, tout peut aller très vite aujourd'hui à l'ère du digital. Mais une bonne idée peut vite être copiée. Alors, si le concept est aussi bon que le produit, autant mettre le pied sur l'accélérateur. Pour se faire connaître, de jeunes pousses n'hésitent plus à mettre la main à la poche pour s'offrir une vitrine à MIF Expo, le plus grand salon dédié à la promotion des produits en France. C'est un moyen d'asseoir une notoriété au delà de la boutique en ligne. C'est aussi un moment privilégié pour partager quelques minutes avec ses clients, défendre les valeurs de sa boite, expliquer et encore expliquer...

Lancer une marque textile, c'est possible aujourd'hui, en tout cas sur le segment du haut de gamme. On peut même produire en petite série à condition de faire appel à l’innovation. Mais pour produire en qualité et à prix compétitif, il faut trouver des usines, des ateliers dotés d'un parc machine et de petites mains expertes répondant aux plus grandes exigences des donneurs d'ordres. 

Pour Maxime et Marine Heyman, ce fut plutôt un cheminement par essai-erreur. Ce couple lillois a lancé la marque Le Coq en Pap' en 2014, une micro-entreprise qui revisite le noeud papillon, avec des textiles tissés et confectionnés dans le Nord, du côté de Roubaix. 

 

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"J'ai fait une école de commerce et je suis un ancien de La Redoute et mon épouse travaillait également dans une autre entreprise textile du Nord. Nos produits sont intégralement fabriqués dans la métropole lilloise. Au début, nous faisions tout nous-mêmes et j'ai du prendre des cours de couture (coupe, patronnage...). Aujourd'hui, nous travaillons avec différents petits ateliers autour de Roubaix pour des questions de disponibilité et de réactivité. On a mis du temps à les trouver, c'est venu petit à petit. Ce type d'accessoire textile est délicat à produire, il faut que tout colle parfaitement à nos exigences" explique Maxime.

Les clients qui se rendent à MIF Expo sont généralement prêts à payer plus cher pour des produits labellisés Made in France. Ils veulent aussi, et c'est normal, en savoir plus sur les matières et sur les lieux de fabrication. Pour l'heure, Maxime préfère ne pas en dire trop pour préserver son avantage concurrentiel. On n'est jamais trop prudent....Plus tard sans doute...

Le consommateur est plus sensible encore à l'idée de permettre à des personnes en difficulté d'insertion d'acquérir un savoir-faire qui pourrait se perdre, l'acte d'achat revenant alors à participer à quelque chose de plus grand, de plus noble...


C’est aussi le pari du Drap Français qui s’est lancé en 2017 dans le linge de lit haut de gamme en produisant 100% français. Pour Eddy Chevrier, directeur Technique au Drap Français, le produire local se conjugue avec le produire social.

 

"Nous concevons et fabriquons en France, dans les Vosges, du linge de lit haut de gamme. L’idée est de proposer une alternative responsable et viable à long terme, en tout cas en opposition à la production de masse. Nous avons choisi de nous appuyer sur le savoir faire vosgien et choisi Mouline Thillot (Le Thillot) pour la partie tissage, Crouvezier (Gérardmer) pour l’ennoblissement, la confection étant réalisée à la Bresse, au sein d’une association d’insertion, l’ABI qui s’adresse à des personnes en difficulté. Le recrutement s’effectue via Pôle emploi ou la Mission Locale. Nous avons formé 10 personnes au travail de piqueuse. On leur apprend à couper, à confectionner et à broder avec minutie. C’est un moyen de les remettre dans le circuit de l’emploi. C’est aussi une démarche responsable à tous les niveaux qui profite à l’économie locale. L'ennoblissement est un critère important pour le label Made in France et il ne peut pas être réalisé ailleurs qu'en France...".  

Pour Eddy Chevrier, il faudrait même aller plus loin en matière de traçabilité. En tout cas, sans le secours et le savoir-faire de ces usines et ateliers parfois centenaires, il serait impossible de continuer de produire du textile de qualité France avec une traçabilité garantie. Notre pays en a fort heureusement préservé quelques-uns.

 

Cette réalité s'impose à d'autres métiers...

Résultat de recherche d'images pour "frod's lunetterie"Ainsi, pour Florent Robaut, un opticien qui a lancé sa propre marque de lunetterie haut de gamme mais accessible à tous, Frod's Lunetterie, la connaissance des circuits et des lieux de fabrication est déterminante. Et si l'on veut les meilleurs, il faut se faire un peu limier. Ce concepteur de la lunetterie connait visiblement son affaire qui a sélectionné ses partenaires sur leur notoriété en terme de compétences. Et comme il dit, ils font partie de l'élite.

 

"Pour la poudre, la visserie et les charnières, je me fournis en Italie. Je n'ai pas vraiment le choix. Les italiens sont les maîtres, ils détiennent les brevets. Le reste est fabriqué en France. Par exemple, la fabrication des plaques d'acétate de cellulose se fait à Morez dans le Haut-Jura, la coloration à Bellignat, la découpe, lassemblage, le polissage, la finition, le marquage à Oyonnax, au total cinq partenaires en incluant la partie design" explique Florent.

Comme on le voit, l'exigence est forte. C'est pourquoi, au salon MIF Expo, on parle beaucoup de matières, de matériaux, de fournisseurs, d'écologie, de relocalisation, d'empreinte carbone, de circuits courts et des emplois que le produire en France permet de créer ou de maintenir.

Et bien sûr, on est là aussi pour faire un peu de business....