Publié le 03/06/2023

A voir et à revoir : « l’âge d’or de la pub » sur France 3

A voir et à revoir : « l’âge d’or de la pub » sur France 3

Par Rémy Dreano.

À la fin du 19ème siècle, l’affiche est le principal support d’expression publicitaire en France. Les colonnes Morris, pionnières de l’affichage publicitaire, les kiosques à journaux ont essaimé dans les grandes métropoles, faisant le bonheur des sociétés d’affichage et des colleurs d’affiche.

 

L’esthétisme des premières affiches n’est pas évident, le message prime. Le paysage urbain parisien se pare d’affiches collées. Vers fin 1920, une nouvelle génération d’affichistes invente une publicité moderne. L’affiche est plus stylisée, on commence à reconnaître des polices de caractère sur certaines. Adolphe Mouron dit Cassandre, Charles Loupot, Paul Colin mettent alors en valeur les trains Pullman, le Café Martin, les automobiles Bugatti. Les collectionneurs et les antiquaires s’arrachent leurs lithographies encore aujourd’hui.

 

Que ces affiches soient élevées au rang d’œuvres d’art, c’est amplement mérité et c’est sans doute ce qui a donné à la publicité ses lettres de noblesse. La réclame est aussi à la radio. L’année 1923 voit la première réclame radiophonique avec un établissement de nuit pour annonceur. Dès lors, commerçants et industriels des villes moyennes y voient l’opportunité de promouvoir plus efficacement leurs produits. Le slogan se prête bien à la radio. Concis et percutant, le message est répété à l’envi sur les ondes, assez pour s’imprimer dans la mémoire collective.

 

Marcel Bleustein-Blanchet fonde, en 1926, Publicis, premier grand groupe publicitaire français. L’Exposition universelle de 1937 et son « pavillon de la publicité » consacre la professionnalisation des publicitaires et ses trois professions : le publicitaire, l’annonceur et l’affichiste. La publicité de marque a fait son entrée à la télévision au début des années 70. Si le slogan “la Pile Wonder ne s’use que si l’on s’en sert » a marqué la génération née en 1920, Dim et son jingle « Ta-Ta, Ta-Ta, Ta-Ta… » a marqué la génération née en 1950. La publicité devient alors un travail d’équipe, une mécanique parfaitement huilée entre créatifs et commerciaux, le team créatif étant le pilier de l’agence.

 

La frénésie règne dans les studios, l’argent coule à flot, c’est l’âge d’or de la publicité en France. Pour beaucoup, la campagne culte (1981) « j’enlève le haut », réalisée par l’agence CLM/BBDO pour l’afficheur Avenirmarque la fin de cet âge d’or. 1981 est aussi l’année du lancement de la nuit des publivores au Grand Rex. Il y aura bien le spot mythique Jex Four avec Alice Sapritch « avant j’étais moche » (1985), mais le mythe est écorné par des scandales et la publiphobie commence à s’installer.

 

Conscient des risques, Christian Blachas, journaliste et fondateur de l’hebdomadaire Stratégieslance en 1987 l’émission Culture Pub sur la chaîne M6, un magazine qui s’attache à décrypter le monde de la publicité pour mieux nous le faire comprendre.  Mais, l’omniprésence de la publicité finit par lasser l’opinion au point d’en faire un bouc émissaire. Accusée d’être agaçante, superficielle par les uns, intrusive, polluante, voire sexiste par d’autres, elle incarne au fond la profession enviable que l’on adore détester. Elle dérange et fascine à la fois.

 


Aujourd’hui surveillées par le gendarme « ARCOM », menacées par la désintermédiation et la fragmentation et, maintenant, par la Convention citoyenne sur le climat qui vise à réduire la surexposition publicitaire, les agences doivent se réinventer pour garder la confiance des annonceurs et éviter de disparaître.

Des annonceurs eux-mêmes pris au piège du politiquement correct (greenwashing, femwashing, wokewashing, raison-d’être-washing) contraignant les agences à un véritable travail d’équilibriste.

 

On note que les agences traditionnelles peinent à attirer les talents qui sont plus attirés par les startups de tech et les géants du conseil. D’ailleurs, dans les écoles de commerce, la filière publicitaire fait moins recette. Insidieusement, les rémunérations stagnent depuis trop longtemps dans les agences traditionnelles, au point que le salaire d’entrée d’un media-planner est à peu près équivalent à ce qui était proposé dans les années 90. Outre que la profitabilité des agences ne cesse de baisser, attirer les talents avec des salaires moins attractifs qu’hier devient problématique, surtout quand le futur devient plus hypothétique. L’inquiétude pointe chez les publicitaires et nul ne sait comment tout cela va finir.

 

La publicité traditionnelle n’a pas dit son dernier mot…

 

Retrouvez tous les enjeux et perspectives sur le GdRE. Deux fiches sont consacrées aux métiers de la publicité